Tout pour préparer une expédition pour gravir le Denali
tentes au camp 3
Comment grimper le Denali (alias Mac McKinley), plus haut sommet d’Amérique du Nord (6194m) ? Après y avoir organisé un voyage là-bas, je vous livre tout ce qu'il faut savoir pour préparer cette expédition !
vue sur le massif du Denali
Tout d'abord constituer l’équipe. Il vous faut choisir un leader, un nom d’équipe, et remplir un questionnaire détaillé sur votre liste de courses, et les personnes à prévenir en cas d’accident.
Mais il faut surtout s’y prendre de nombreux mois à l’avance, en théorie 2 mois (minimum et impossible d’y déroger) mais il faut (bien) plus car c’est le délai officiel que les rangers américains du parc Denali peuvent prendre pour vérifier votre dossier, éventuellement contacter le leader s’ils veulent des précisions sur votre liste de courses (ils peuvent vous déconseiller de venir s’ils estiment que vous n’avez pas la compétence pour, sans pouvoir vous l’interdire), et vous n’allez pas prendre votre billet la veille du départ ;-), donc il faut anticiper. Dans notre cas on m’a accordé le permis en une semaine mais cela peut prendre plus de temps.
avion local (Talkeetna) pour aller sur le glacier
On vous demandera aussi quelle compagnie locale d’aviation vous emmènera sur le glacier, et les dates souhaitées pour votre permis (début et fin) : prendre large en cas de doute, rien ne vous oblige à démarrer votre expédition le 1er jour de validité de votre permis, par contre vous ne pourrez pas débuter avant. Une fois le permis accepté et payé individuellement par carte bancaire (370 $ / personne), dans le mail d’acceptation il y aura un lien pour prendre rendez-vous avec les rangers à Talkeetna (c’est très bien fait puisque vous visualisez directement les créneaux disponibles, d’où l’intérêt aussi d’avoir demandé son permis tôt pour pouvoir choisir, 2 mois avant il reste peu de places..).
Il faut savoir de plus qu’une fois le permis accordé vous ne pouvez changer qu’une personne de l’équipe (ajout ou suppression) donc être bien sûr de son équipe.
Toute la démarche est expliquée sur le site officiel ici (http://www.nps.gov/dena/planyourvisit/mountaineering.htm), pour veiller à ce que vous ayez bien tout lu il y a d’ailleurs un code inscrit dans le texte qu’il faut recopier lors de la demande de permis.
massif du Denali
Quand partir ?
La saison s’étale de Avril à Juillet mais surtout Mai-Juin à mi-Juillet. En 2017 il y a peu de succès en Mai, idem cette année (les premières ascensions fin Avril puis plus rien jusqu’au 23 Mai, et il est tombé 6m de neige !). Mi-Juin les températures augmentent et les crevasses peuvent être bien ouvertes en Juillet. Le meilleur créneau semble donc être Juin (les statitistiques au bureau des rangers le montrent), celui que j’avais choisi était parfait (arrivée fin Mai). Il y a autant d’ascensions en Mai qu’en Juillet mais à refaire j’arriverais même mi-Mai pour éviter le risque de chaleur en fin d’expé (on parle beaucoup de froid au Denali mais en bas sur le glacier il peut faire très chaud). Liaisons France-Anchorage avec escale à Seatle ou autre ville américaine ou canadienne. A noter un vol existe direct depuis Francfort pour Fairbanks (plus au Nord), moins cher à certaines dates (compagnie Condor).
météo au Denali
Compagnie locale pour aller sur le glacier :
Talkeetna Air Taxi (celle que j’ai choisi : rien à redire), K2 Aviation (beaucoup de rotations), Sheldon (bien aussi apparemment et moins cher, mais moins de rotations). Acompte de 100$ a la réservation, environ 600$ par personne l’aller retour. Date à l’aller à prévoir, pas nécessaire pour le retour bien entendu. Attention au fait que les vols ne sont possibles que si le camp de base est dégagé, donc vous n’êtes pas assurés de partir le jour voulu. Chaque compagnie peut vous héberger une ou deux nuits avant votre vol (ou après, chez TAT on a droit à deux nuits dans une petite maison bien crado, mais bon ça dépanne, 10$ par nuit supplémentaire).
Elles vendent des tuteurs (bambous) pour marquer les caches de matériel que vous ferez ou marquer votre chemin. 10$ les 25.
Prévoir ruban, stickers spécifiques pour reconnaître les vôtres (les rangers fournissent cinq stickers à votre nom) car tout le monde a les mêmes.
Chaque grimpeur peut emmener 56kgs dans l’avion (petit supplément au-dessus).
préparatifs matériel avant de prendre l'avion
Hôtel à Anchorage et navette :
Pour vous rendre à Talkeetna, vous pouvez prendre le train (minimum 50$ en s’y prenant en avance mais les tarifs en période touristique montent vite à 140$...), un taxi personnel, ou une navette. Notre choix s’est porté sur Alaska shuttle (réservation en ligne sur alaskashuttle.com avec acompte) car il a un circuit (arrêts imposés) pré-défini dans Anchorage permettant de choisir son hôtel en fonction des arrêts. On a donc choisi le Base Camp Anchorage Hotel, sorte de petite colocation-auberge de jeunesse, rapport qualité prix pas top (lits superposés style armée) mais bon c’est juste pour 2 nuits, et un arrêt se trouve à cet hôtel. 62$ l aller simple pour Talkeetna, avec 10$ par bagage (le moindre petit bagage style les tubes en plastique donc ça peut monter vite....). Il fait un arrêt dans un supermarché Carrs au bout d’ une heure de route, pratique pour s’acheter un sandwich et une dernière bricole mais pas assez pour y faire ses courses :-). En cherchant il y a moyen de trouver mieux sûrement, en tous cas aussi bien, car ils ont voulu m’embobiner au retour et à l’aller le chauffeur regardait plus ma co-équipière à côté de lui que la route :-) !
préparation de la nourriture à Anchorage
Courses à Anchorage :
Si vous faites vos courses au supermarché, il y a le Walmart Supercenter qui est un des plus gros supermarchés (on y a complété nos courses, notamment pour la semoule) ou le Carrs, légèrement moins allanché. Si vous achetez chez Carrs, demandez la carte de fidélité, elle peut vous faire faire de bonnes économies ! Mais attention, en Alaska tout est importé donc tout est (très) cher, vraiment. Même le tube de dentifrice...
Une autre solution peut être de faire ses courses chez Costco à l’est de la ville (avoir un moyen de locomotion). C'est l équivalent de Metro, mais ouvert aux particuliers.
coucher et lever de soleil au Denali en pleine nuit
Magasins de sport :
REI (le plus grand), AMS , etc ... (AMS se trouve aussi à Talkeetna mais je vous conseille de faire tous vos achats à Anchorage car si ce nest pas dispo à Talkeetna c’est trop tard). Les deux sont l’un en face de l’autre mais le premier est bien plus grand.
Hourding Marmot : à éviter, ne fait quasiment que de vente de choses usagées. Par contre cela vaut le coup d’oeil !!! On y trouve des vieilles Koflach, de vieux piolets, des crampons des années 50 et j’en passe et des meilleures ! A des prix complètement inappropriés (qui voudrait d’un vieux piolet droit tout usagé pour 90$?). J’y ai vu une paire historique d’Artic verte : même modèle que celles portées par « green boots » un indien mort à l’Everest en 1995, célèbre pour ces chaussures. Elles ont donc plus de 20 ans, inadaptées désormais et se vendent quasi 200$.
coin cuisine aménagé en neige
Essence / gaz :
Quasiment tout le monde utilise de l’essence sous forme de baril (gallon) de 3.78 l. Compter un baril pour 3 personnes par semaine (en étant large).
Il se commande au niveau de la compagnie et vous le récupérez à votre arrivée sur le glacier. Simple.
Au niveau du gaz, c’est beaucoup plus compliqué, car le butane est interdit ou autorisé par la compagnie suivant la marque, le modèle. Bien se renseigner avant auprès de la compagnie ! Mais privilégier l’essence (white gas)...
Personnellement j’avais opté pour 2 réchauds à essence de marque différentes. Le Nova de chez Optimus que je connaissais déjà, et le Xqk de chez Msr (utilisé par 80% des guides là-bas). Les 2 ont leurs avantages et leurs inconvénients (j’aime bien l’allumage du Nova qui permet d’être fait avec une pierre à feu et il consomme moins, par contre l’eau est plus longue à faire du coup). J’ai utilisé le Nova jusqu’au camp à 4300m, les deux à ce camp, puis le Xqk au-dessus. Si vous ne devez qu’en prendre qu’un, prenez ce dernier (plus performant en altitude, ça crache !).
En termes de capacité de bouteille, en prévoir 2. Pourquoi deux ? car cela permet d'en avoir une servant de stockage (plutôt que de devoir transporter un gallon plus ou moins plein). Une de 600ml et une de 900ml environ est un bon choix, ou deux de 900ml (éviter celle de 300ml, à moins d'aimer devoir s’arrêter en pleine cuisson...).
En repartant, si vous souhaitez laisser de l'essence à une équipe (pour vous alléger à la descente) l’échanger contre un gallon vide car au retour vous devez rendre le même nombre de gallons que vous aviez à l'aller (et ne pas détruire le container en le compressant pour qu'il prenne moins de place).
Prévoir une bouteille de 800ml environ (moins ça impose de le recharger trop souvent, voire d’être interrompu en pleine popote, pénible) et une autre de 1l environ pour stockage (au dernier camp supérieur par exemple, cela évite de devoir monter le baril ...).
Bien nettoyer ces bouteilles (comme les réchauds) pour qu’il n’y ait plus une seule trace d’essence afin d’éviter les problèmes à l’aéroport. Garder les bouteilles vides et ouvertes dans son sac cabine (pour éviter qu’on les croit pleines en soute) et mettre les réchauds en soute.
tente tipi pour la cuisine
Tentes :
Le Denali est le temple des tentes Hilleberg. J'apprécie énormément ces tentes mais on en trouve relativement peu en Himalaya (contrairement aux tentes VE25 de North Face que je n'aime pas vraiment, trop lourdes compaéees à leur résistance). Ici, toutes les compagnies américaines guidées les utilisent, c'est incroyable, et particulièrement le modèle Keron GT. Ça tombe bien, c'est celui que j'avais en stock et choisi pour le Denali. Je peux vous les louer. En fait on trouve sur place à la louche 40% de tentes Hilleberg (dont 80% le modèle Keron GT), 40% de tentes Mountain Hardwear, 10% de Sierra Design (surtout des tentes Tipi pour la cuisine) 10% d'autres notamment des VE25.
Il est bien à mon avis d'avoir deux tentes (je l’explique dans la partie stratégie), ainsi qu’une tente très légère sans fond pour la cuisine (un simple toit), ou un tipi, ou un tarp (et une bâche en dernier recours). En creusant une tranchée sous la tente, avec un coin cuisine à hauteur de poitrine, on peut s’aménager toute une cuisine et un salon, relativement chaud car fermé et à l abri de la tempête. Pour un groupe qui commence à 6 personnes c’est presque indispensable. A trois, j’avais fait le choix d’une grande bâche uniquement pour limiter le poids et le travail de terrassement à effectuer. Mais ceci n’est valable que si vous avez une personne dévouée dans l équipe pour faire la popote en plein vent et en pleine tempête. Il y a eu 2,3 jours où j’ai souffert de devoir sortir dehors faire à manger sous ma bâche, à moitié abrité, sans compter la difficulté à allumer le réchaud ! Donc privilégier quand même une petite cuisine entièrement couverte.
Il existe des abris très légers, sorte de toile de tente, prévues pour 2, 4, 6 personnes. Ça ne pèse rien (100 a 300g), prend une place ridicule dans le sac, et ça permet de se sauver d'une tempête imprévue. J'en possède une deux places. Mais cela ne permet pas de tenir des jours entiers et comme les tempêtes au Denali ne durent rarement que quelques heures...
tentes au camp 2 du Denali
Pulkas :
En plastique, elles sont fournies par les compagnies d’aviation (location 10$). Certaines sont équipées de cordelettes et de tendeurs, la plupart non. Prévoir tendeurs et deux cordelettes de 2m50 en 6mm, ainsi que des tubes en plastiques pour rigidifier la liaison pulka-humain (dans lesquels on passera les cordelettes). On peut s’en procurer à Anchorage chez Lowes (ou autre magasin de bricolage). C est un point crucial si on ne veut pas galérer ! L idéal étant d’avoir pu s’entraîner chez soi avec une pulka pour tester le système.
Charger les sacs de telle façon que le plus lourd soit en bas, le léger en haut.
La longueur des pulkas (pour TAT) est de 1.52m * 0.58m * 15cm de haut, modèle ProExpedition, cela différe un peu suivant les compagnies.
Le rendez-vous chez les rangers à Talkeetna :
Il faudra payer 10$/personne de droit d’entrée dans le parc et écouter un speech d’une heure avec diaporama (en anglais) expliquant certaines choses environnementales et donnant certains conseils pour l’ascension.
Moyen de communication :
Fortement recommandé par les rangers, mais non obligatoire.
Radio deux bandes familiales : comme les talkies-walkies chez nous, sauf que les fréquences sont différentes, donc il vous faut un modèle américain (et vice versa, les fréquences américaines sont interdites d’utilisation en France, car soumises a licence). Là aussi, je les loue.
Mais vous pouvez en trouver chez REI à l’achat. Pratique pour communiquer entre équipiers et pour recevoir la météo tous les soirs a 20h (canal 1, le canal des rangers). C’est aussi sur ce canal que vous pouvez appeler les secours....
Si vous ne devez avoir qu’un seul moyen de communication, ce serait celui la. Mais si c’est juste pour la météo que vous les souhaitez, vous pouvez demander un résumé de la météo aux expés voisines.
Système InReach Explorer de Garmin : top car une fois l’abonnement pris vous pouvez communiquer par sms avec vos proches et recevoir leur météo par exemple.
Téléphone satellite : Thuraya ne passe pas, Iridium oui.
Smartphone : on oublie ... quasi aucune couverture, et compte-tenu du froid en plus...
Boîte CMC :
Alias la boîte à caca... Les rangers vous en fournissent plusieurs suivant la taille de votre equipe, ainsi que des sacs biodégradables. Deux vertes pour une petite équipe, et une grise en plus pour le camp de base. Au camp à 4300m (où sont les rangers) il y a une crevasse où on peut jeter les sacs (un sac = 10 à 12 utilisations).
camp 3
Matériel divers :
Scie a neige : indispensable. Vu les conditions que l’on peut rencontrer sur le Denali, il faut construire des murs autour de la tente (surtout du côté où arrive majoritairement le vent) sur 1,5m à 2m de hauteur. Il est possible de trouver un emplacement déjà aménagé par une expé partie mais il faudra de toutes façons le consolider donc... Des modèles existent dans les magasins americains mais en France on peut trouver une scie qui se clippe sur les bâtons de ski de marque Black Diamond. C’est ce que j'avais. Pieus à neige et ancres à neige : inutile d'avoir une dizaine de pieus comme j'ai pu le voir. 1 ou 2 suffisent, et ancre facultative suivant le niveau de la cordée. Le Headwall (au-dessus du camp 3) est équipé d'une corde fixe (prévoir donc un jumar), et l'arête est pourvue d'une multitude de pieus à neige installés par et pour les compagnies, il suffit donc d'avoir des mousquetons. Pour le passage menant au Denali Pass (au-dessus du camp 4) les pieus à neige étaient même cette année pourvus de mousquetons. Un pieu à neige (ainsi qu’une broche à glace supplémentaire) peut être utile pour renforcer un amarrage de tente. Piquets et fanions : ceux fournis par les rangers ne sont pas suffisants (seulement pour les dépôts). Si on considère qu'on doit être autonomes, il est préférable d'acheter des piquets supplémentaires auprès de votre compagnie d'aviation à Talkeetna (10$ les 20) pour baliser l'itinéraire.
Pour résumer le matériel technique minimum nécessaire : 2 auto-bloquants en 5mm, une poulie, une micro-traction, 2 sangles, 2 broches à glace, 2 mousquetons à vis dont un unidirectionnel, 1 mousqueton simple (pour mouflage et sortie de crevasse), scie à neige.
Arva, pelle (une bien solide plus grosse pour le groupe pour creuser la neige très dure lors de la construction d'une plate-forme pour la tente), sonde bien entendu (utile pour sonder -encordés- , le lieu où on place la tente - le camp 2 notamment est parcouru par des crevasses) même s'il y a peu de pentes avalancheuses et qu'il faut mieux attendre qu'une pente stabilise avant d’y passer.
Skis ou raquettes ? L'avantage des skis est surtout pour la descente finale, un peu aussi au départ sur le looong faux plat montant. Mais la pente entre camp 2 et camp 3 qui ne peut se faire qu'en crampons à la montée (c'est raide avec une pulka !) a dicté mon choix d'opter pour les raquettes, choix assez évident en fait. Sachant qu'en plus il faudra des chaussures en plus des chaussures à ski pour le camp 3-camp 4-sommet, la seule option où le ski l'emporte sur les raquettes est celle d'une personne seule et rapide voulant faire le Denali d'une traite, en étant très léger. Prendre des chaussures très chaudes bien entendu, style Millet Everest, La Sportiva Olympus ou G2 (cette dernière étant bien pratique pour serrer ses chaussures avec des gants) ou alors les Asolo 8000 (moins polyvalent car trop juste pour de l'himalayisme mais d'un très bon rapport qualité prix).
Ne pas oublier un bon duvet -20 minimum, therm-a-rest, tapis de sol, bâche pour les tentes, piquets de tente prévus pour la neige (je me suis fait construire des carrés en alliage léger percés de deux trous agrémentés d'une ficelle, que j'utilise en Himalaya).
Conseil supplémentaire : vu les températures, se scotcher un bout de tapis de sol sur le piolet avec un peu de « duct tape » peut éviter d'avoir froid aux mains le dernier jour (la main tenant le piolet).
En montagne le ridicule ne tue pas quand il s'agit de s'éviter des gelures. Je connais un grand monsieur qui se colle des bouts de plastiques sous les lunettes pour limiter la réverbération : cela ne ressemble à rien et il fut pourtant piolet d'or !
coucher de soleil sur le Denali depuis le Windy Corner (3900m)
Nourriture :
On avait prévu pour 31 jours maximum (on avait prévu le sommet quelque soit le temps passé sous les tempêtes :-) et deux sommets en rab si on le souhaitait après le Denali), donc forcément beaucoup de nourriture (cinq jours laissés au camp de base) et au final nous étions au départ à moins de 40kgs par personne sur la pulka, et dix kilos environ dans le sac à dos, bien moins que ce que j'avais pu lire... Demander ma liste complète (matériel et nourriture) et vous vous simplifierez grandement la tâche !
Je ne pouvais pas me le permettre, mais il faut savoir qu'au camp 3, quand les gens partent, ils ont (tous !) de la nourriture en trop donc pour se délester, ils donnent. Il est donc judicieux de monter plus léger et de se faire presque entretenir une fois arrivé au camp 3 (en nourriture ET en essence, même les guides réquisitionnent l'essence pour leurs collègues qui suivront). On peut s'épargner ainsi quelques kilos à traîner sur le long glacier mais surtout au passage dit du « motorcycle hill » (quelques kilos en plus peuvent transformer cette montée en une montée dangereuse ou un véritable calvaire).
L'ennemi, c'est le poids. Donc niveau nourriture j'ai privilégié des aliments gonflants à l'eau mais pesant peu (semoule, purée, polenta en moindre quantité), soupes, barres de céréales légères (les dures gèlent de toutes manieres), au détriment des lyophilisés (ca laisse beaucoup de dechets) et bien entendu des boîtes de conserve, à ne pas emmener !
Stratégie :
C’est là que cela devient intéressant, en tous cas l’aspect que je préfère. On voit de tout au Denali, ceux qui avancent bien chargés et font des camps réguliers, supplémentaires, sont qui voyagent léger entre les camps, les compagnies qui ont des guides permanents à certains camps et qui tournent, etc.
Je vous livre la stratégie que j’ai utilisé (et je ne regrette rien ;-)) :
Montée au camp 1 (2400m)
Dépôt au camp 2 (3400m)
Montée au camp 2
Repos
Dépôt après le Windy Corner a 4100m
Montée au camp 3 (4300m)
Aller-retour au dépôt à 4100m
Repos
Repos
Dépôt à 5000m
Repos
Dépôt au camp 4 (5200m) en récupérant au passage le dépôt à 5000m, et nuit au camp 4.
Redescente camp 3.
Repos
Montée au camp 4 avec les affaires sommets (tout ce qu'on a de plus chaud)
Sommet, nuit camp 4.
Redescente camp 3.
Repos.
Redescente camp de base en 1 ou plusieurs jours.
Le planning que j'avais établi a été respecté au jour le jour. A un changement près : on a gagné un jour sur le portage en évitant un dépôt au camp 1 bis factice, et on a du supprimer un jour de repos après notre dépôt au camp 4 pour être redescendu au camp 3 avant l’arrivée des vents forts, mais sinon le planning prévu était parfait. Un maître mot : ne pas faire des journées de dingue hyper chargé, privilégier au contraire moins de poids mais plus d'aller-retour (et de dénivelé). Ce n'est pas un problème car ça permet aussi de s'acclimater.
Certaines équipes n'ont qu'une seule tente. Cela implique de devoir demonter son camp à chaque déplacement mais économise 5kgs de poids environ.
Cela a son avantage jusqu’au camp 3 inclus. Mais pour le dernier camp cela ne laisse pas la possibilité d'y aller déposer une tente avant de faire le sommet. Pour moi il est important d'aller faire un depot, redescendre, se refaire la santé et monter léger ensuite pour faire nuit au camp 4 puis sommet. Si vous comptez enchaîner camp 4 puis sommet sans être allé dormir avant au camp 4 (ce que font beaucoup d’équipes), alors ne prenez qu’une tente. Ce n’est pas ce que je préconise mais chaque stratégie se défend.
Une autre possibilité (valable notamment pour des équipes de 4 ou plus, fonctionnants par cordée) est d’avoir des tentes classiques jusqu’au camp 4 et des tentes d’assaut pour le dernier camp (deux places, plus légères, environ 1.5kgs). Cela apporte de la souplesse si quelqu'un est malade, si les cordées ne montent pas toutes ensembles pour le summit day. Ces tentes sont plus fragiles et destinées qu’a y passer une nuit ou deux, mais l'idée n'est pas d'aller s'installer au camp 4 en pleine tempếte donc c’est un choix très pertinent. J'ai pensé faire ce choix mais à trois il fallait rester de toutes facons toujours ensemble donc le choix était moins pertinent. A quatre je le prendrais.
Si vous faîtes un dépôt/cache de matériel, bien l'enfouir sous la neige dans un sac en toile (avec 2 tuteurs accompagné d'un sticker de votre équipe), car certains dépôts se font ouvrir par les oiseaux.
Un conseil : ne pas rester au camp de base sauf si vous arrivez trop tard, et ne pas partir trop tard dans la journée. Il peut faire chaud et on se fatigue plus vite avec la chaleur. Mieux vaut partir tôt et avoir un peu froid au départ, mais arriver frais au camp suivant. En plus on évite la foule (ils partent tous vers 10h, pas avant !). Mais au Denali plus qu'ailleurs, ne pas suivre comme des moutons et faire comme le voisin, mais suivre son propre jugement.
Est-ce pour vous ?
Le Denali n'est pas un endroit pour découvrir la montagne, ni le mouflage pour les crevasses, le camping sur neige, ni même pour découvrir une pulka, mếme si tout reste possible, au vu de ce que l'on peut parfois voir ! Cependant, il suffit d'une bonne tempếte pour aboutir à des catastrophes plus ou moins graves, ou même juste un bon coup de vent et de nuages en plein étape pour que cela tourne au vinaigre. Ce sommet est bien moins dur qu'un 8000, vraiment, mais les conditions de vent et de froid peuvent rendre la chose vite compliquée si on n'y est pas preparé. C'est un point à ne pas prendre à la légère. Si on s'est entraîné niveau logistique (mouflages, pulka, tentes...) et que l'on a suffisamment de temps, c'est un sommet long, mais très abordable. La trace est souvent faite, il y a du monde, le camp 3 peut s'apparenter a un camp de base (en termes de confort et de securité), et je côte la difficulté technique de l'ensemble à PD-/I. Comme je l'avais dit avant de partir, “si on ne fait pas le sommet, c'est qu'on est vraiment mauvais”. Ce sommet peut être un bon entrainement à une expédition himalayenne plus soutenue et sauvage, et permet de souder un groupe avant d'envisager un programme plus ambitieux.
glaciers du Denali
Pour un compte-rendu détaillé de notre ascension, c'est ici :
Le matériel complet et la nourriture :
Liste de matériel détaillé à me demander par mail (je vous inscrirai à ma newsletter).
Pour la location, c’est ici : https://www.pasquer-voyages.com/location-de-materiel-expedition
Sachez que je peux vous proposer un pack : tente, scie à neige, talkies-walkies, réchaud etc.
Exemples de prix : réchaud à essence 50e, radios 20e, panneau solaire performant 80e, balise de détresse 5e, etc.
N’hésitez pas à poser des questions ou apporter des compléments directement sur ce blog, je n’ai pas de notifications mais je viendrai regarder de temps en temps s’il n y a pas de questions. Bonne préparation et bonne chance !
paysage du centre de l'Alaska